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Dukkha, l'internet noir.

SIXIEME SINISTRE Chapitre6

CHAPITRE 6

 

 

La grille d’une cellule semblait s’ouvrir dans le couloir opposé, et l’on pu discerner les sanglots d’une femme.

-”Depuis combien de temps suis-je ici?...”, s’interroge Kavatche, égaré dans le temps et exténué.

Avachi, les jambes croisées sur l’inconfortable sol de béton, et n’éprouvant plus la moindre sensation, il cherche de la main quelque chose à agripper, quelque chose lui permettant de se redresser, mais en vain.

 

Le bruit sourd d'un canon chargé résonna soudainement et les gémissements cessèrent alors.

-"Elle est morte, maintenant...", pensa Kavatche.

 

Malgré la tourmente, il propose de poursuivre son histoire là où il en était resté.

-“

Fy avait vraisemblablement eu une conversation agitée avec son père, avant de nous rejoindre, moi et la jeune femme aux plumes dont j’avais oublié le nom, à notre voiture…

Un vieux caddie ordinaire, sans charme, en sale état, pas ou peu entretenu, étalé dans la boue, mais heureusement équipé tout de même d’un moteur à propulsion de six cartouches*, reconnaissable aux bruits de ses chaînes.

Deux types trapus déposèrent les corps dans le coffre puis les recouvris de petits déchets de bois, pour masquer l’odeur.



Fy pris péniblement le volant, marmonnant des insultes à l’égard de Drefl.

 

Par politesse, je m’installa à l’arrière, pensant que notre collègue choisirait la place passager, plus confortable, mais elle se joint finalement à moi, s’asseyant élégamment derrière Fy.

 

Sa classe naturelle et sa démarche, son parfum délicat, ses cheveux rasés sur les côtés, ses vêtements de laines légers si singulier, ainsi que son collier de deux plumes ne laissaient aucun doute sur ses flagrantes origines Atshan.

 

Le véhicule démarra enfin, bruyamment, et je me trouva par conséquent pris au piège, forcé de participer à cette mission qui exaltait tant Fy.

Au moins, ses histoires de famille avaient de quoi m’occuper jusqu’à ma fuite."



*Moteur à cartouches: on utilise le terme cartouche comme ‘unité de mesure’ pour définir la puissance d’un moteur.

 




La voiture, pas assez puissante pour gravir les pentes trop abrupt du canyon, oblige le groupe à longer l’ensemble du fleuve, sur plusieurs centaines de kilomètres afin d’atteindre sa source, à l’ouest, où des chemins plus aisés sont accessibles.

 

-”Ce type est censé être mon père. Mais ce n’est qu’un idiot.”, persiste Fy, frustrée, passant ses nerfs sur le volant,

“Samana, explique lui combien notre mission est importante.”

 

 

 

"Elle et moi échangions un regard révélateur de l’atmosphère pesante qu’avait installée Fy.

Malgré la pression, Samana s'exécuta, calmement."

 

 

 

-”Hé bien… On doit rejoindre le Tronc. Là bas on rendra les corps aux familles pour qu’ils puissent entrer en deuils et les enterrer dignement…”

-”Exactement ! N’importe qui aurait pu s’occuper de ça mais il a fallut que ce soit moi.”, marmonne t’elle.

 

Un brève silence s’impose finalement, entaché par quelques bruits de moteurs, mais se faisant tout de même agréable.

Distrait, Kavatche ne prête plus aucune attention aux plaintes qu’exprime Fy, trop occupé à examiner l’étendu d’eau, attentivement.

Amer, il pense de nouveau à Bëdia, se souvenant de sa mission, et de son échec.

 

 

"Lorsque je détourna mon attention du fleuve, je croisa de nouveau le regard de Samana qui décela immédiatement ma peine.

Elle, s’approchant de moi par compassion pour ouvrir un dialogue, je m'efforçai de lui simuler ma gratitude, gêné, espérant qu’elle me fiche la paix.

Mais au lieu de ça, elle usa de son charme pour détourner habilement ma tentative, ne se laissant pas convaincre, puis m'interrogea, me demanda ce qui me préoccupait tant.

Je prétexta être inquiet pour l’animal “KûLinta”.

Elle, adepte des croyances religieuses Atshan, m’apprit que la présence de KûLinta ne présageait rien de bon, celui ci ayant pour objectif de protéger les hommes du mal...

 

Même si toutes ces histoires ne me paraissent être qu’un ramassis de conneries, je ne pouvais pas me permettre de l’affirmer ouvertement ici, étant conscient de l’importance qu’a la religion dans l’esprit Buks.

 

Cependant, j'interrogeai tout de même Samana sur ses convictions."

 

 

-”Mes certitudes n’ont jamais été aussi solides. Tout cela n’est pas qu’une simple croyance, c’est bien réel. Tous ce que l’homme ne peut expliquer, le Pusta* le peu.”, affirme Samana, persuasive.

-”Hum… Le collier de plumes, c’est en rapport avec ta religion, pas vrai?”

-”Oui. Les plumes occupent une place importante dans notre culture, mais nous ne parlons pas de religion à Atsha. C’est plutôt une philosophie, un mode de vie… L’amour de notre planète Ishka et de sa nature, n’a rien de religieux. Quant à mon collier, il est une manière de montrer l’affection que j’éprouve à l’égard de Singal, la déesse de l’amour. Elle m’inspire beaucoup, petite, je m'identifiais souvent à elle, c’est pourquoi j’ai conçu mon propre collier, tout comme elle, avec les trois plumes de ma maison… Les plumes sont symbole de vitalité. Je me souviens avoir entendu une vieille histoire qui prétendaient que leur disparition entraîneraient la perte d’Ishka.”

 

Fy, freinant brusquement, interromps la discussion:

-”On fait une pause ici.”

 

*Pusta: est un livre religieux Atshan, très moralisateur, qui conte les conflits des hommes contre les démons.

 

 

 

"Cela faisait déjà des heures de l’on avançait, et il nous était toujours impossible d’entrevoir autre chose à l’horizon que les gigantesques parois du canyon, creusées par cette interminable fleuve.



Je descendis le premier, afin de me dégourdir les jambes.

Fy, elle, ouvrit le compartiment avant de la voiture pour vérifier l’état du moteur, ce qui me paraissait être une bonne idée au vue de la quantité de fumée qui s’en dégageait.

 

S'approchant de la rive, Samana m’invita à la rejoindre d’un regard, probablement pour me parler seul à seul."

 

 

 

-”Kavatche? Je ne sais pas, est ce que je prononce bien ton nom?”, s’excuse t’elle, buvant quelques gorgées d'eau fraîche.

-”Oui, c’est parfait.”

La svelte jeune femme s’étonne, en levant les yeux, de l’imposante carrure du géant, qui s’amuse alors de la situation:

-”Je ne veux entendre aucune blague sur ma complicité avec les portes, compris?”

Samana est alors prise d’un fou rire qu’elle dissimule, par pudeur.

-”Je ne me le serai jamais permis !”, assure t’elle.

Soigneusement, elle sélectionne quelques brins d'herbes qu'elle semble ensuite tisser ensemble.

 

Le géant captivé se désaltère à son tour de quelques gorgées d'eau, entreprenant ensuite de tisser des tiges, tout comme la jeune femme, mais abandonnant très vite cette idée, ne parvenant à rien à cause de ses doigts trop robustes pour une tâche aussi minutieuse.

 

 

 

 

Terminant le tissage de ce qui semble être un collier, Samana le questionne, intéressée:

-”Ce n’est pas KûLinta qui te préoccupe, pas vrai?”.

-”Beaucoup de chose me préoccupent…”, affirme t’il, détournant la question avec peu de réussite puisque Samana la réitère:

-”Parle moi de tes problèmes.”



 

“Parler de mes soucis m’aurait été d’une grande d’aide mais… Mince je me sens pas très bien. On devrait peut être faire une pause...”, bafouille Kavatche, visiblement à bout de force.

Se redressant péniblement, il remarque que la silhouette a disparu dans les ténèbres.

Appelant alors désespérément à l’aide, gémissant, il succombe finalement à la fatigue et s’évanouit sur le sol.

 

 

 

 

 

 

 

Publié le 24/09/2015.

 

 

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24/09/2015
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